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Auteur Jean-Pierre Rioux
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Faire une suggestion Affiner la rechercheGuide des Livres : « Dieux ! Que ne suis-je assise... » / Jean-Pierre Rioux in L'Histoire, N° 496 (Juin 2022)
[article]
in L'Histoire > N° 496 (Juin 2022) . - p. 82
Titre : Guide des Livres : « Dieux ! Que ne suis-je assise... » Type de document : Livres, articles, périodiques Auteurs : Jean-Pierre Rioux, Auteur Année de publication : 2022 Article en page(s) : p. 82 Langues : Français (fre) Mots-clés : lecture repos découverte abandon les temps Note de contenu : Histoire du repos, Alain Corbin, Plon, 2022, 167 p., 15 €.
Alain Corbin poursuit sa recherche du temps perdu. Le voici de nouveau à la découverte des paysages de la sensibilité, d'émotions enfouies, de représentations et d'imaginaires oubliés ou piétinés. Naguère il explorait les miasmes et les jonquilles, les arbres et les rivages, la fraîcheur de l'herbe ou le son des cloches. L'an passé, c'était La Rafale et le zéphyr (Fayard), la tempête redoutable ou la brise caressante, signatures du désert comme de la montagne : tout un univers éolien authentifié dans la Bible comme chez les Romantiques. Aujourd'hui il s'attaque au repos pour nous aider à comprendre qu'il faudrait peut-être songer, demain, à sortir du stress généralisé et du week-end détox, pour prendre, enfin, le temps d'être avec soi et les autres ; pour comprendre encore la détresse de Phèdre qui cherche, elle, « l'ombre des forêts » quand « tout m'afflige, me nuit et conspire à me nuire ».
L'essai est bref, dispersé, parfois désinvolte. Il renvoie souvent à son envers moins ébouriffé, la belle Histoire de la fatigue. Du Moyen Age à nos jours (Seuil, 2020) de Georges Vigarello. Curieusement, il récuse les romanciers et préfère les musiciens, les moralistes et les poètes, de Virgile à Francis Ponge. Mais il signale savamment, mine de rien, des points tout à fait disruptifs.
Le premier tient à notre abandon, massif et satisfait, du repos éternel, « socle » de cette histoire en Occident, signature immémoriale d'un dévouement de l'homme à son Créateur, obstacle à la dislocation de l'âme et à la paresse maléfique, recherche d'une quiétude et marque d'un retrait qui signera une alliance à perpétuité. « Un signe entre moi et vous », dit Yahvé dans L'Exode, magnifié par le sabbat ; un « doux besoin » dans la Genèse, qui depuis Constantin a fait sanctifier chrétiennement le repos dominical, inventer le requiem et respecter les morts au « champ du repos ». Thérèse d'Avila, François de Sales, Pascal, Bossuet ou Montaigne sont utilement convoqués pour nous rafraîchir la mémoire. Car aujourd'hui, sur les pierres tombales, seuls les regrets sont éternels.
Deuxième disruption, autre abandon : notre passage du repos personnel au loisir qui « occupe le temps » et « envahit l'espace ». L'auteur excelle dans la présentation de la lente et tâtonnante émergence, depuis Rousseau rêvant en barque sur le lac de Bienne jusqu'aux années sea, sex et sun, de ce nirvana qui a fui le temps chronométré des révolutions industrielles, imposé le repos hebdomadaire et non plus dominical, conquis les congés payés et magnifié la retraite : barbecue, transat et grand soleil, délassement plus qu'approfondissement, tout ce qui a « asséché, aplani, simplifié l'histoire du repos ».
Un léger regret, pour finir. Antique souci des Bucoliques, respect des saisons, joies des feuilles mortes et des printemps, douceur de Millet : ce chapitre sur la nature n'est qu'esquissé alors que la question nous tenaille de nouveau. Alain Corbin, fort de son enfance normande et de sa thèse limousine, pouvait en faire un plat principal. Pourquoi non, cher homme ? La pudeur, sans doute.
[article] Guide des Livres : « Dieux ! Que ne suis-je assise... » [Livres, articles, périodiques] / Jean-Pierre Rioux, Auteur . - 2022 . - p. 82.
Langues : Français (fre)
in L'Histoire > N° 496 (Juin 2022) . - p. 82
Mots-clés : lecture repos découverte abandon les temps Note de contenu : Histoire du repos, Alain Corbin, Plon, 2022, 167 p., 15 €.
Alain Corbin poursuit sa recherche du temps perdu. Le voici de nouveau à la découverte des paysages de la sensibilité, d'émotions enfouies, de représentations et d'imaginaires oubliés ou piétinés. Naguère il explorait les miasmes et les jonquilles, les arbres et les rivages, la fraîcheur de l'herbe ou le son des cloches. L'an passé, c'était La Rafale et le zéphyr (Fayard), la tempête redoutable ou la brise caressante, signatures du désert comme de la montagne : tout un univers éolien authentifié dans la Bible comme chez les Romantiques. Aujourd'hui il s'attaque au repos pour nous aider à comprendre qu'il faudrait peut-être songer, demain, à sortir du stress généralisé et du week-end détox, pour prendre, enfin, le temps d'être avec soi et les autres ; pour comprendre encore la détresse de Phèdre qui cherche, elle, « l'ombre des forêts » quand « tout m'afflige, me nuit et conspire à me nuire ».
L'essai est bref, dispersé, parfois désinvolte. Il renvoie souvent à son envers moins ébouriffé, la belle Histoire de la fatigue. Du Moyen Age à nos jours (Seuil, 2020) de Georges Vigarello. Curieusement, il récuse les romanciers et préfère les musiciens, les moralistes et les poètes, de Virgile à Francis Ponge. Mais il signale savamment, mine de rien, des points tout à fait disruptifs.
Le premier tient à notre abandon, massif et satisfait, du repos éternel, « socle » de cette histoire en Occident, signature immémoriale d'un dévouement de l'homme à son Créateur, obstacle à la dislocation de l'âme et à la paresse maléfique, recherche d'une quiétude et marque d'un retrait qui signera une alliance à perpétuité. « Un signe entre moi et vous », dit Yahvé dans L'Exode, magnifié par le sabbat ; un « doux besoin » dans la Genèse, qui depuis Constantin a fait sanctifier chrétiennement le repos dominical, inventer le requiem et respecter les morts au « champ du repos ». Thérèse d'Avila, François de Sales, Pascal, Bossuet ou Montaigne sont utilement convoqués pour nous rafraîchir la mémoire. Car aujourd'hui, sur les pierres tombales, seuls les regrets sont éternels.
Deuxième disruption, autre abandon : notre passage du repos personnel au loisir qui « occupe le temps » et « envahit l'espace ». L'auteur excelle dans la présentation de la lente et tâtonnante émergence, depuis Rousseau rêvant en barque sur le lac de Bienne jusqu'aux années sea, sex et sun, de ce nirvana qui a fui le temps chronométré des révolutions industrielles, imposé le repos hebdomadaire et non plus dominical, conquis les congés payés et magnifié la retraite : barbecue, transat et grand soleil, délassement plus qu'approfondissement, tout ce qui a « asséché, aplani, simplifié l'histoire du repos ».
Un léger regret, pour finir. Antique souci des Bucoliques, respect des saisons, joies des feuilles mortes et des printemps, douceur de Millet : ce chapitre sur la nature n'est qu'esquissé alors que la question nous tenaille de nouveau. Alain Corbin, fort de son enfance normande et de sa thèse limousine, pouvait en faire un plat principal. Pourquoi non, cher homme ? La pudeur, sans doute.
Guide des Livres : Enfin Berl nous parle / Jean-Pierre Rioux in L'Histoire, N° 503 (Janvier 2023)
[article]
in L'Histoire > N° 503 (Janvier 2023) . - p. 84
Titre : Guide des Livres : Enfin Berl nous parle Type de document : Livres, articles, périodiques Auteurs : Jean-Pierre Rioux, Auteur Année de publication : 2023 Article en page(s) : p. 84 Langues : Français (fre) Mots-clés : lecture livre Berl publications écrivain journaliste Note de contenu : Le Temps, les idées et les hommes, Emmanuel Berl, Bouquins, 2022, 896 p., 30 €.
Bernard de Fallois réédite aux éditions Bouquins les textes d'Emmanuel Berl, mort en 1976, qu'il avait d'abord publiés chez Julliard en 1985, augmentés d'une biographie pétillante de Bernard Morlino. Car, pense-t-il à raison, nos paniques politiques, européennes, intellectuelles et morales d'aujourd'hui, Berl ce méconnu les avait pressenties. Pourquoi diable ne pas le dire ?
Berl, il est vrai, est oublié. Non sans raisons, dont les belles âmes l'ont accablé dès 1945 et jusqu'à sa mort. Oui, l'écrivain, le journaliste, le pamphlétaire a été munichois en 1938 et il l'a proclamé par haine de la guerre, au nom de ceux de sa génération dont les capotes avaient été maculées par les cervelles et les tripes des camarades hachés dans les tranchées ou celles des gosses bombardés. Ce qui fut le cas pour lui, le jeune Berl, pris dans les barbelés parmi sa section à l'agonie puis avec deux bébés mourants dans les bras, sur le front des Vosges. Oui aussi, de nuit, dans un hôtel de Vichy, il a rendu lisibles les discours des 23 et 25 juin 1940 d'un maréchal peu radiophonique, où il avait glissé les deux seules phrases qui resteront : « Je hais les mensonges qui nous ont fait tant de mal » et « La terre, elle, ne ment pas. »
Oui, mais. Vite vacciné contre les pétainistes et les collabos « qui s'enfoncent dans le délire », Juif planqué au fond de la Corrèze, Berl y a côtoyé avec joie des résistants locaux sans s'engager dans un mouvement. Après 1945 il s'est réfugié dans les études d'histoire, a vagabondé dans la presse qui ne lui tenait pas rancune et, surtout, a entouré la femme de sa vie, Mireille, une résistante, elle, auteure de chansons et folle de swing. Il l'accompagna jusqu'en 1974, en « téléspectateur engagé » dès 1954, dans le studio d'enregistrement du si populaire « Petit conservatoire de la chanson ».
Cette fin sans amertume ne doit pas faire oublier le journaliste redouté, le critique littéraire et l'amateur d'art fougueux, l'engagé en politique renié par la gauche comme par la droite, l'observateur féroce de la société à travers sa dénonciation de la Mort de la morale bourgeoise (Gallimard, 1930). Un titre aujourd'hui à la poubelle mais qui posait une question de confiance qui devrait mieux nous hanter de nos jours : dissous dans nos contradictions, « sommes-nous réellement incapables de tout lâcher, d'avouer que tout nous lâche ? ».
Dans cette édition Bernard de Fallois collationne des articles piochés dans Combat, La Table ronde, Le Nouveau Candide ou Preuves, sans s'attarder sur ceux d'avant la guerre. Le parcours multiforme de ces essais est jalonné par huit entrées, l'histoire, la politique, l'Europe, les écrivains, l'art, la justice, les Juifs, les débats de notre temps. Face aux imposteurs et aux snobs, on y croise nombre de ceux qui comptèrent pour Berl, au nom de l'intelligence et du vrai : Voltaire, Proust, Camus ; Michelet, Marc Bloch ; Saint Louis, de Gaulle, Mauriac, la philosophe Simone Weil ; les Juifs français et Israël.
Beaucoup d'autres Justes, beaucoup d'idées éclaircies, beaucoup de virulence : la preuve que Berl mérite encore le détour.
[article] Guide des Livres : Enfin Berl nous parle [Livres, articles, périodiques] / Jean-Pierre Rioux, Auteur . - 2023 . - p. 84.
Langues : Français (fre)
in L'Histoire > N° 503 (Janvier 2023) . - p. 84
Mots-clés : lecture livre Berl publications écrivain journaliste Note de contenu : Le Temps, les idées et les hommes, Emmanuel Berl, Bouquins, 2022, 896 p., 30 €.
Bernard de Fallois réédite aux éditions Bouquins les textes d'Emmanuel Berl, mort en 1976, qu'il avait d'abord publiés chez Julliard en 1985, augmentés d'une biographie pétillante de Bernard Morlino. Car, pense-t-il à raison, nos paniques politiques, européennes, intellectuelles et morales d'aujourd'hui, Berl ce méconnu les avait pressenties. Pourquoi diable ne pas le dire ?
Berl, il est vrai, est oublié. Non sans raisons, dont les belles âmes l'ont accablé dès 1945 et jusqu'à sa mort. Oui, l'écrivain, le journaliste, le pamphlétaire a été munichois en 1938 et il l'a proclamé par haine de la guerre, au nom de ceux de sa génération dont les capotes avaient été maculées par les cervelles et les tripes des camarades hachés dans les tranchées ou celles des gosses bombardés. Ce qui fut le cas pour lui, le jeune Berl, pris dans les barbelés parmi sa section à l'agonie puis avec deux bébés mourants dans les bras, sur le front des Vosges. Oui aussi, de nuit, dans un hôtel de Vichy, il a rendu lisibles les discours des 23 et 25 juin 1940 d'un maréchal peu radiophonique, où il avait glissé les deux seules phrases qui resteront : « Je hais les mensonges qui nous ont fait tant de mal » et « La terre, elle, ne ment pas. »
Oui, mais. Vite vacciné contre les pétainistes et les collabos « qui s'enfoncent dans le délire », Juif planqué au fond de la Corrèze, Berl y a côtoyé avec joie des résistants locaux sans s'engager dans un mouvement. Après 1945 il s'est réfugié dans les études d'histoire, a vagabondé dans la presse qui ne lui tenait pas rancune et, surtout, a entouré la femme de sa vie, Mireille, une résistante, elle, auteure de chansons et folle de swing. Il l'accompagna jusqu'en 1974, en « téléspectateur engagé » dès 1954, dans le studio d'enregistrement du si populaire « Petit conservatoire de la chanson ».
Cette fin sans amertume ne doit pas faire oublier le journaliste redouté, le critique littéraire et l'amateur d'art fougueux, l'engagé en politique renié par la gauche comme par la droite, l'observateur féroce de la société à travers sa dénonciation de la Mort de la morale bourgeoise (Gallimard, 1930). Un titre aujourd'hui à la poubelle mais qui posait une question de confiance qui devrait mieux nous hanter de nos jours : dissous dans nos contradictions, « sommes-nous réellement incapables de tout lâcher, d'avouer que tout nous lâche ? ».
Dans cette édition Bernard de Fallois collationne des articles piochés dans Combat, La Table ronde, Le Nouveau Candide ou Preuves, sans s'attarder sur ceux d'avant la guerre. Le parcours multiforme de ces essais est jalonné par huit entrées, l'histoire, la politique, l'Europe, les écrivains, l'art, la justice, les Juifs, les débats de notre temps. Face aux imposteurs et aux snobs, on y croise nombre de ceux qui comptèrent pour Berl, au nom de l'intelligence et du vrai : Voltaire, Proust, Camus ; Michelet, Marc Bloch ; Saint Louis, de Gaulle, Mauriac, la philosophe Simone Weil ; les Juifs français et Israël.
Beaucoup d'autres Justes, beaucoup d'idées éclaircies, beaucoup de virulence : la preuve que Berl mérite encore le détour.
Guide des Livres : De Sakiet à Évian / Jean-Pierre Rioux in L'Histoire, N° 495 (Mai 2022)
[article]
in L'Histoire > N° 495 (Mai 2022) . - p. 82
Titre : Guide des Livres : De Sakiet à Évian Type de document : Livres, articles, périodiques Auteurs : Jean-Pierre Rioux, Auteur Année de publication : 2022 Article en page(s) : p. 82 Langues : Français (fre) Mots-clés : lecture livre guerre d'Algérie paix Note de contenu : En guerre(s) pour l’Algérie. Témoignages, Raphaëlle Branche, Tallandier, 2022, 432 p., 22,90 €.
Mourir à Sakiet. Enquête sur un appelé dans la guerre d’Algérie, Véronique Gazeau-Goddet, Tramor Quemeneur PUF, 2022, 408 p., 24 €.
Vers la paix en Algérie. Les négociations d’Évian dans les archives diplomatiques françaises, Maurice Vaïsse (dir.), Éditions du CTHS, 2022, 548 p., 29 €.
Dans le flot des livres parus à l'occasion du 60e anniversaire de la fin de la guerre d'Algérie voici, sur son versant français, trois retours aux sources, trois quêtes de vérités : trois préalables d'histoire, en surplomb de la commémoration.
Maurice Vaïsse, Chantal Morelle, Olivier Delorme et Sadek Sellam ont fait un travail de bénédictins pour mettre en ordre de marche historique la masse des notes, des lettres, des télégrammes et des procès-verbaux des séances qui ont fait aboutir les discussions entre Français et Algériens tenues de mai 1961 à mars 1962 à Évian, Lugrin, aux Rousses puis de nouveau à Évian. Dans une langue limpide, tout est là sur la table, promis au meilleur comme au pire et sans claire valeur juridique en droit international : de Gaulle si pressé d'en finir, les surenchères du FLN, le cessez-le-feu sur fond d'attentats, le sort des Européens, le Sahara, le référendum, l'autodétermination et peut-être la coopération. « Que les négociations d'Évian aient été une suite de concessions et que par la suite ces accords aient été contestés, puis de moins en moins respectés par les Algériens, c'est certain. Il n'en reste pas moins que la France sortait d'une situation de guerre dans laquelle elle n'avait cessé de se trouver, en fait, depuis 1939 », conclut Maurice Vaïsse.
Pour faire bonne mesure historique de la guerre elle-même, il restera aussi à passer les témoignages au trébuchet. Raphaëlle Branche le fait depuis plusieurs années et, cette fois, elle agence avec sobriété et lucidité 15 des 70 récits de vie recueillis par l'INA et Arte depuis 2018. En échantillons du malheur, défilent un maquisard de la wilaya 2, un Kabyle « messaliste » émigré à Charleroi, une communiste favorable à l'indépendance, une « métro » des centres sociaux torturée à la villa Susini, un gosse en camp de regroupement, un gars du contingent dans les Aurès, un tueur de l'OAS, un berger chaouï devenu harki, une rapatriée. Tous pris dans le kaléidoscope de la violence et de la peur, du lâche abandon, de l'exil forcé et des espoirs à vau-l'eau.
L'enquête de Véronique Gazeau-Goddet et Tramor Quemeneur le confirme ô combien. L'aspi Bernard Goddet est tombé, avec 14 camarades, dans l'embuscade que l'ALN leur a tendue le 11 janvier 1958 près du bordj de Sakiet et à laquelle, le 8 février suivant, répliqua le bombardement du village tunisien voisin que l'ONU condamna et qui accéléra la chute de la IVe République. « Catho » conservateur mais qui lisait Témoignage chrétien en cachette, tout juste sorti d'HEC, Bernard Goddet envoyait des lettres rassurantes à sa famille mais il doutait fort des bienfaits de la « pacification ». Il avait 24 ans.
Mot clé :
Livres
[article] Guide des Livres : De Sakiet à Évian [Livres, articles, périodiques] / Jean-Pierre Rioux, Auteur . - 2022 . - p. 82.
Langues : Français (fre)
in L'Histoire > N° 495 (Mai 2022) . - p. 82
Mots-clés : lecture livre guerre d'Algérie paix Note de contenu : En guerre(s) pour l’Algérie. Témoignages, Raphaëlle Branche, Tallandier, 2022, 432 p., 22,90 €.
Mourir à Sakiet. Enquête sur un appelé dans la guerre d’Algérie, Véronique Gazeau-Goddet, Tramor Quemeneur PUF, 2022, 408 p., 24 €.
Vers la paix en Algérie. Les négociations d’Évian dans les archives diplomatiques françaises, Maurice Vaïsse (dir.), Éditions du CTHS, 2022, 548 p., 29 €.
Dans le flot des livres parus à l'occasion du 60e anniversaire de la fin de la guerre d'Algérie voici, sur son versant français, trois retours aux sources, trois quêtes de vérités : trois préalables d'histoire, en surplomb de la commémoration.
Maurice Vaïsse, Chantal Morelle, Olivier Delorme et Sadek Sellam ont fait un travail de bénédictins pour mettre en ordre de marche historique la masse des notes, des lettres, des télégrammes et des procès-verbaux des séances qui ont fait aboutir les discussions entre Français et Algériens tenues de mai 1961 à mars 1962 à Évian, Lugrin, aux Rousses puis de nouveau à Évian. Dans une langue limpide, tout est là sur la table, promis au meilleur comme au pire et sans claire valeur juridique en droit international : de Gaulle si pressé d'en finir, les surenchères du FLN, le cessez-le-feu sur fond d'attentats, le sort des Européens, le Sahara, le référendum, l'autodétermination et peut-être la coopération. « Que les négociations d'Évian aient été une suite de concessions et que par la suite ces accords aient été contestés, puis de moins en moins respectés par les Algériens, c'est certain. Il n'en reste pas moins que la France sortait d'une situation de guerre dans laquelle elle n'avait cessé de se trouver, en fait, depuis 1939 », conclut Maurice Vaïsse.
Pour faire bonne mesure historique de la guerre elle-même, il restera aussi à passer les témoignages au trébuchet. Raphaëlle Branche le fait depuis plusieurs années et, cette fois, elle agence avec sobriété et lucidité 15 des 70 récits de vie recueillis par l'INA et Arte depuis 2018. En échantillons du malheur, défilent un maquisard de la wilaya 2, un Kabyle « messaliste » émigré à Charleroi, une communiste favorable à l'indépendance, une « métro » des centres sociaux torturée à la villa Susini, un gosse en camp de regroupement, un gars du contingent dans les Aurès, un tueur de l'OAS, un berger chaouï devenu harki, une rapatriée. Tous pris dans le kaléidoscope de la violence et de la peur, du lâche abandon, de l'exil forcé et des espoirs à vau-l'eau.
L'enquête de Véronique Gazeau-Goddet et Tramor Quemeneur le confirme ô combien. L'aspi Bernard Goddet est tombé, avec 14 camarades, dans l'embuscade que l'ALN leur a tendue le 11 janvier 1958 près du bordj de Sakiet et à laquelle, le 8 février suivant, répliqua le bombardement du village tunisien voisin que l'ONU condamna et qui accéléra la chute de la IVe République. « Catho » conservateur mais qui lisait Témoignage chrétien en cachette, tout juste sorti d'HEC, Bernard Goddet envoyait des lettres rassurantes à sa famille mais il doutait fort des bienfaits de la « pacification ». Il avait 24 ans.
Mot clé :
Livres
L'histoire du monde de 1918 à nos jours / Jean-Pierre Rioux
Titre : L'histoire du monde de 1918 à nos jours : Afrique-Amériques-Europe-Extrême-Orient-Océanie Type de document : Livres, articles, périodiques Auteurs : Jean-Pierre Rioux, Directeur de la recherche Editeur : Paris : Larousse Année de publication : 1997 Importance : 576 p. Présentation : rel ISBN/ISSN/EAN : 978-2-03-209015-0 Langues : Français (fre) Mots-clés : 20e siècle étude historique Index. décimale : -93 Ancien Histoire L'histoire du monde de 1918 à nos jours : Afrique-Amériques-Europe-Extrême-Orient-Océanie [Livres, articles, périodiques] / Jean-Pierre Rioux, Directeur de la recherche . - Paris : Larousse, 1997 . - 576 p. : rel.
ISBN : 978-2-03-209015-0
Langues : Français (fre)
Mots-clés : 20e siècle étude historique Index. décimale : -93 Ancien Histoire Réservation
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